Avril 1998
1. La sécurité
L’évolution urbanistique du quartier au cours des trente dernières années à considérablement modifie Ie paysage de la butte de Picardie au sommet de laquelle se situe la place Thierri de Ville d’Avray.
L’augmentation du nombre de foyers habitant dans le triangle formé par la rue du General Pershing, l’avenue des Etats-Unis et la lisière de la foret de Fausses Reposes, ou à la périphérie immédiate de ce triangle, à connu deux grandes étapes : les années 60 (installation de plus de 200 foyers) et les années 90 (arrivée d’environ 200 nouveaux foyers).
Cette évolution à été simultanément marquée par une accentuation des problèmes de sécurité lies à l’entrée et à la sortie des automobiles à la hauteur des résidences nouvellement construites d’une part, à la vitesse excessive des véhicules circulant sur la rue du Général Pershing et sur l’avenue des Etats-Unis, d’autre part.
Empruntée quotidiennement par 10 000 véhicules, l’avenue des Etats-Unis est l’aboutissement d’un axe routier rectiligne non policé de 2 km entre la sortie de Ville d’Avray et le premier feu tricolore au niveau du Pavillon des Filtres.
Trois raisons plaident en faveur d’un aménagement routier en haut de la butte de Picardie : l’accroissement du nombre des résidents, l’augmentation du trafic automobile et la multiplication des accidents.
La densification de la population dans cette partie de Versailles et l’absence d’aménagements structurels pour briser la vitesse des véhicules expliquent en effet, pour partie, l’augmentation du nombre des accidents au cours des dernières années. Si la majeure partie d’entre eux ont été matériels, quelques-uns out été mortels, de nombreux ont failli l’etre.
Accident survenu en 1997 devant le 55 de l’avenue des Etats-Unis, au débouché de la place Thierri de Ville d’Avray.
Des mesures durables sont donc nécessaires pour ramener au niveau légal la vitesse des véhicules entrant et sortant de Versailles par cet axe et pour sécuriser 1’entrée et la sortie des résidences en haut de la cote de Picardie. Le rond-point sur la place Thierri de Ville d’Avray
résout simultanément ces deux questions.
Le rond-point giratoire permet aux véhicules venant de Versailles et entrant dans les résidences des 55 et 59 avenue des Etats-Unis (près de 300 foyers) de ne pas « couper le flux descendant des voitures » en s’intégrant à celui-ci par une rotation prioritaire autour du rond-point de la place Thierri de Ville d’Avray.
Trajet des véhicules venant de Versailles et entrant dans les résidences des 55 et 59 avenue des Etats-Unis avec le rond-point de la Place Thierri de Ville d’Avray préconisé par I’AS.RI.EU.PE et dérivé du plan établi par Jacques Carlu en 1937.
2. Le respect historique
Sise en haut de l’avenue des Etats-Unis, en limite extrême de la ville de Versailles, la place Thierri de Ville d’Avray est l’emanation du monument Pershing – La Fayette érigé en 1937. Son dessin et sa topologie procèdent du concours ouvert pour l’erection de ce monument.
Article 2
Le monument sera érigé au sommet de la butte de Picardie, en un rond point à créer à la cote 176.61 du plan.
Premier paragraphe de l’article 2 du programme du concours restreint pour l’érection du monument Pershing La Fayette (1937).
Le monument étant reste inachevé, la place est demeurée à 1’etat d’ébauche, c’est à dire un espace vierge, et elle n’a de place que le nom.
Jacques Carlu, l’architecte du monument, a-t-il réalisé un plan du rond-point ? La réponse est non car cette partie du programme ne lui incombait pas conformément aux clauses du concours.
Article 3
Le profil en long de la route nationale N°185 sera modifie de manière à ce que le point central de la composition projetée constitue la cote la plus élevée de ce profil en long.
Cette modification de profil sur toute la largeur de la route, y compris son élargissement prévu à 30 mètres, sera effectuée par l’ Administration des Ponts et Chaussées et n’est donc pas comprise dans les travaux ici mis au concours.
Premier et deuxième paragraphe de l’article 3 du programme du concours de 1937.
Dans son projet, il respecte néanmoins à la lettre les conditions du concours en prévoyant 1’emplacement du rond-point par un élargissement de la route entre les deux socles du monument. Historiquement, la rénovation et 1’achevement du monument appellent la réalisation du rond-point prévu à 1’origine pour cette place.
Dans son « rapport sur 1’achevement du monument Pershing La Fayette
élevé au sommet de la cote de Picardie à Versailles » du 17 juin 1963, c’est-à-
dire 26 ans après la réalisation des socles, Jacques Carlu précise que, en dépit de
tout, l’esprit du concours à été respecté et que le projet initial n’a pas été
modifie, ni par lui ni par les autres parties prenantes.
Dans ces conditions de délais et de crédits insuffisants, peut-être eut-il été sage de réduire les dimensions des ouvrages et de les limiter aux seuls grands socles supportant les statues équestres.
Cette solution fut envisagée par les auteurs du projet, mais comme celui-ci devait, dans l’esprit du Comité, conserver intact le caractère monumental conforme au programme initial et que par ailleurs la construction envisagée ne constituait elle-même qu’une première tranche de travaux destinée à être complétée par la suite par de vastes emmarchements, accompagnés de motifs de sculpture, lors de I’abaissement, prévu à cette époque, du sommet de la Cote de Picardie, il fut décidé de tenter, coûte que coûte, d’exécuter les travaux prévus en première tranche, ceux-ci pouvant être parachevés dans un avenir estimé proche, grâce à la deuxième tranche.
Jacques Carlu
17 juin 1963
La réalisation de l’abaissement de la route et du rond-point revenant aux Ponts et Chaussées – à 1’origine du projet – devait s’inscrire dans une deuxième tranche de travaux suivant l’achèvement de la première tranche. Cette dernière n’ayant jamais été menée à bien, le rond-point n’a pas été dessiné définitivement, ni à fortiori construit.
Le rond-point est « consubstantiel » du monument. L’aménagement routier à ce niveau, comme celui programme pour 1998 par la Direction Départementale de 1’Equipement, doit intégrer un « concept rond-point » pour respecter le caractère historique du lieu, pour autant que le mémorial est reconnu en tant que site.
3. L’intégration dans un site
Point de transition entre un axe forestier et une route urbaine formant une ligne parfaitement rectiligne, le monument est constitue de deux socles qui se font face. Dans 1’esprit de ses concepteurs, leur éloignement doit être compensé par un rond-point liant symboliquement les deux personnages, et par leur biais les pays et faits historiques, commémorés.
Toute réalisation rectiligne (de type bandeau ou terre-plein pave) conduirait à une distanciation entre les deux éléments du monument contraire à la démarche des instigateurs du projet : deux pays se rapprochant, dans un face à face digne, par leurs idéaux d’indépendance et de liberté. Par ailleurs, elle ne sécuriserait pas les entrées et les sorties des résidences limitrophes.
En s’intégrant dans la perspective de 1’avenue tout en préservant la symbolique du monument, le rond-point ne rompt pas la rectitude de l’axe, mais la rythme en douceur. Il empêche par ailleurs les véhicules, de location et autres, de stationner au sein du monument, et donc de profaner le lieu de mémoire.
Correctement conçue, la signalétique de cet aménagement routier ne sera pas plus préjudiciable au site que ses abords actuels (bannières commerciales, panneaux et marquages divers, décharge de vieux véhicules), elle l’ordonnera bien au contraire face aux désordres périphériques.
Fonde historiquement, le rond-point bien intégré dans son environnement constitue une amélioration de la sécurité routière et préfigure un monument dignement achevé.